Le Candidat qui se fait son cinéma

Plus que quelques minutes avant que n'entre en vigueur l'interdiction absolue pour tout candidat de déposer un message ou même un commentaire sur un blog. L'heure est donc grave, et il est sans doute essentiel que j'utilise à bon escient cette ultime cartouche avant "de laisser parler les urnes" (voilà une expression consternante quand on prend la peine d'y réfléchir).

J'ai repris le chemin de mon collège avant-hier, le mercredi 5. J'ai alors réalisé que, pour la première fois, je revenais dans mon établissement plus crevé après des vacances qu'avant. Que pour la première fois, j'ai bossé encore plus durant les vacances qu'avant, sans relâche ou presque et que, même si l'expérience a été enrichissante et agréable, elle est aussi exténuante. Surtout quand cette reprise des cours fait suite à deux journées intenses de stage à Toulouse, également épuisantes à plusieurs titres. Mais il est aussi finalement reposant ou rassurant de retrouver mes petites troupes et une atmosphère plus "normale", mes petits 6e qui "m'ont vu dans le journal" et ne paraissent pas trop s'en étonner (ils ont peut-être d'autres motifs d'être étonnés par mes cours) ou mes 4e qui, m'ayant vu eux aussi "dans le journal", se sont empressés de me chambrer en m'appelant "Monsieur le Conseiller" ou, mieux, "le Samouraï" (je pressens que ce surnom va durer un petit moment, juste revanche de ceux à qui j'attribue régulièrement de tels surnoms comiques au gré de mon inspiration et de leurs frasques).

Au programme de cette semaine qui s'achève : stage de formation, reprise des cours sur les chapeaux de roue avec le bilan du second trimestre, rencontre orange hier soir (sur laquelle je reviendrai plus tard ici, ainsi, que d'autres menus événements que j'ai dû zapper pour l'instant pour une simple question d'emploi du temps), sans compter un Conseil d'Administration de mon cinéma d'Art-et-Essai des Montreurs d'Images au cours duquel j'ai été élu Vice-Président, titre dont je ne suis pas peu fier - j'en profite pour transmettre toute ma profonde amitié à Michel Pujos, qui a choisi de ne plus se représenter à la Présidence des Montreurs cette année et qui représente à mes yeux bien plus que ce titre de "Président des Montreurs d'Images".

A l'issue de cette semaine de cours, qu'allais-je donc faire dans la dernière ligne droite avant les élections de dimanche pour rentabiliser au mieux cette campagne ? Un petit meeting intime dans un salon cossu, un marché nocturne impromptu, une visite à fond de train, toute affaire cessante, des boîtes à lettres de mon canton ? J'ai préféré me faire une petite toile en allant au ciné au Margot de Nérac voir Cloverfield, un film catastrophe américain sorti il y a quelques semaines.

D'après mes infos, il y a environ quatre-vingt postulants aux 20 postes renouvelables de Conseiller Général du Lot-et-Garonne. Je serais curieux de savoir combien vont régulièrement au cinéma parmi ces quatre-vingt et quelques candidats. Combien se préoccupent personnellement du maintien de la culture dans notre département. Du cinéma, du théâtre, du patrimoine, de la musique, des musées, etc. Je doute qu'ils soient légions. C'est pourtant la partie de mon "programme" que j'ai souhaité défendre lorsque la journaliste de Sud Ouest m'a demandé, mercredi dernier, de lui envoyer un petit texte concernant ma "mesure phare" (avouez que pour un Breton, le terme est plutôt bien choisi !) Un article est donc paru aujourd'hui avec les "mesures phares" des 5 candidats à ces Cantonales sur Nérac. Et je suis plutôt content ("on n'est jamais si bien servi que par moi-même") de mon petit texte quand je le compare aux autres, il me semble que c'est "différent", au sens fort du terme.

Sud_Ouest___7_mars_08

Voilà le texte que j'avais envoyé à Aurélie, journaliste néracaise de Sud Ouest, et qui a été intégralement repris dans le quotidien :

"A l'heure où l'Etat se désengage de manière inquiétante en matière d'action culturelle et où le seul modèle proposé est celui de "l'argent roi", redonner à la Culture une place importante est vital pour notre département : il s'agit de défendre la diversité qu'offrent nos cinémas de proximité face à l'émergence des gros exploitants ; de mettre en réseau les manifestations et initiatives déjà existantes pour renforcer leur efficacité et leur influence ; de créer sur l'Albret un festival de musique de grande envergure ; de revaloriser de vraies perles de notre Patrimoine local, en particulier le Château d'Henri IV, pierre angulaire de tout un "parcours" à imaginer à travers Nérac pour mettre en valeur les richesses de notre canton. A travers ce soutien à la Culture et la garantie de son accès en milieu rural, nous mettrons ainsi en vitrine les atouts de notre département et nous encouragerons son développement économique."

Pour ceux qui connaissent un peu le film Cloverfield, vous pourrez bien sûr me dire que, question diversité culturelle et défense des cinémas d'art-et-essai, j'aurais pu mieux choisir stratégiquement, en misant sur un petit film français du terroir ou un film labellisé "ciné intello". Il se trouve que j'aime beaucoup de films, dans tous les genres, de tous les pays. Les films intellos, oui, condamnés à quelques copies seulement sur tout le territoire français et curieusement absents des multiplexes parce que pas assez rentables, eux non plus, mais aussi parfois des films à grand spectacle, des films de divertissement. Cloverfield appartient à la seconde série. Un film inspiré du Projet Blair Witch pour son aspect pseudo amateur et faussement tourné à la va-vite, un scénario qui puise à des sources cinématographique telles que King Kong, les Godzilla, La Guerre des Mondes, le plus récent The Host, le tout à la sauce traumatique post 11 Septembre. Pas le chef d'oeuvre du siècle, mais un film sympa et plutôt bien fait, qui m'a changé les idées.

Et puis, malgré tout, un film tel que celui-là peut être utilisé pour défendre les salles de proximité. Peu de gens savent en effet qu'un projet de loi est actuellement dans des cartons, qui stipulerait que les multiplexes, dans un rayon de 50km, auraient l'exclusivité d'un film tant qu'ils le projetteraient dans leurs propres salles. Mon cinéma des Montreurs d'Images n'aurait finalement pas grand chose à craindre d'une telle mesure, puisque nous fonctionnons exclusivement avec des films art-et-essai délaissés par ces multiplexes. Par contre, un cinéma comme le Margot à Nérac, ou n'importe quel autre cinéma du département, pourrait y laisser la peau : ce sont ces films plus commerciaux qui leur permettent de vivre, ce sont des films comme l'actuel succès Bienvenue chez les Ch'tis qui assurent leurs recettes et, partant, leur existence. Si ces cinémas de proximité n'ont plus accès à ces films grand public, quelles qu'en soient les qualités ou les défauts cinématographiques, ils passeront par perte et fracas et seront condamnés à disparaître en un temps record, au profit des seuls grands groupes. Par conséquent, Mesdames Messieurs, je me suis porté grand défenseur de nos salles rurales ce soir en allant me faire plaisir devant Cloverfield. Je connais donc mon programme de campagne pour demain soir : ce sera, aux Montreurs d'Images cette fois, Redacted, film que Brian de Palma a consacré à un faits divers survenu durant la Guerre en Irak. Rude vie que celle d'un candidat en campagne !

Je me dépêche, le gong final retentit dans moins de trois minutes ! On se retrouve la semaine prochaine. Quoi qu'il ait pu se passer d'ici là. En attendant, n'oubliez pas d'aller placer un petit papier dans une drôle de boîte en plexiglas - si vous ne comprenez pas à quelle opération je fais allusion, fouillez dans votre courrier, vous y trouverez une enveloppe marronasse qui éveillera vos souvenirs. Ne vous trompez pas parmi les multiples petits papiers que vous devrez placer dans des enveloppes encore plus petites : vous ne pouvez pas vous gourrer, il y a un signe distinctif, les bons exemplaires sont tous imprimés avec de l'encre orange.

Comments

[Augustin Olivar]

Bonjour Roland,

Je suis régulièrement ta campagne à travers les posts de ton blog.

J'apprécie ta façon de faire de la politique autrement.

Ton regard et ton recul vis-a-vis de tes adversaires et de cette campagne est aussi assez
nouveau en politique.

J'espère que tu réaliseras un score qui puisse récompenser tes efforts et ton courage afin que le Mouvement Démocrate soit reconnu comme un parti libre et nouveau dans le paysage politique de notre pays.

A bientôt.

Mes amitiés.

Augustin Olivar